Réflexion stratégique : planifier pour mieux s’adapter

Chaque démarche de réflexion stratégique demande une bonne dose d’adaptation. D’ailleurs, nous y trouvons souvent une occasion de réinventer nos façons de faire. Quand la Maison des femmes sourdes de Montréal nous a confié la responsabilité d’animer une journée de réflexion auprès d’une quinzaine de membres de son équipe et du conseil d’administration de l’organisme, nous avons volontiers saisi cette occasion de tester de nouvelles approches.

Nous pouvions déjà compter sur l’aide de deux interprètes de la langue des signes québécoise (LSQ) pour communiquer. Le vrai défi? Proposer un cadre dans lequel toutes les participantes se sentiraient à l’aise d’échanger et de faire valoir leurs idées et, ainsi, instaurer un climat de confiance et d’ouverture pour que s’installe une réelle communication.

Retour sur une journée riche en échanges

8 h. Nous sommes à pied d’œuvre pour déplacer des tables et aménager la salle de ré. Une douzaine d’affiches grand format fixées aux murs, des tables couvertes de «post-it» multicolores, de marqueurs et d’autocollants… C’est dans cet espace vivant que nous sommes prêts à accueillir les participantes. Notre proposition : un parcours physique au cours duquel elles seront conviées à se déplacer dans la salle pour découvrir le plan stratégique et interagir avec son contenu.  

10 h. L’heure est aux échanges et aux discussions. Le mot d’ordre : garder le processus simple, concret et accessible pour des personnes qui ne sont pas familières avec les concepts de la planification stratégique. Dans cette perspective, nous misons sur le partage d’expériences de chaque participante. L’objectif? Stimuler les discussions sur les réussites et les défis des deux dernières années et identifier et prioriser des pistes d’action pour la suite du plan stratégique.

Nous animons les échanges et, pourtant, les femmes nous regardent peu. Normal : leurs yeux sont rivés sur les interprètes de la LSQ qui permettent le dialogue entre femmes sourdes et entendantes. Notre rôle consiste à ouvrir et à encadrer les espaces de discussion pour ensuite céder la place aux participantes, écouter et poser les bonnes questions aux bons moments.

11 h 45. Avant la pause-dîner, nous proposons un tour de table, question de sonder l’énergie du groupe et connaître leurs impressions sur le déroulement de l’avant-midi. Les échos sont positifs. L’une des participantes nous confie que le matin même, en faisant le trajet vers l’atelier, des doutes l’habitaient. Allait-elle éprouver de la difficulté à suivre et à contribuer aux discussions? Les échanges seraient-ils trop théoriques? Elle est rassurée et agréablement surprise de la façon simple et engageante avec laquelle les sujets sont abordés.

15 h 45. La journée de réflexion tire à sa fin. Nous proposons un dernier tour de table au cours duquel chacune des participantes est invitée à livrer ses impressions sur son expérience. Comme nous l’avions proposé dès l’ouverture de la journée, nous les invitons à choisir, parmi une quarantaine d’images disposées sur la table, celle qui exprime le mieux leur état d’esprit.

Et voilà que la magie opère : tant d’émotions sont exprimées à travers ces images! Si elle favorise la communication entre toutes ces femmes issues d’horizons différents et vivant avec la surdité, cette approche innovante se révèle aussi un moyen puissant pour éveiller les réactions et les rendre plus directes. Dès lors, nous savons que l’objectif est atteint. Toutes les participantes repartent motivées, décidées à mettre leurs forces en commun pour atteindre leurs objectifs.  

S’inspirer de la réalité des participantes

En utilisant un langage visuel et une approche accessible, nous avons gagné notre pari, soit celui de mener une réflexion stratégique d’une façon inédite, créative, adaptée à la réalité des participantes.

Nous nous sommes appuyés sur des valeurs et des éléments centraux de l’approche d’Espace Stratégies :

La collaboration et la co-construction avec nos clients — En révisant la première proposition d’animation que nous lui avons soumise, notre cliente a pu identifier les méthodes qui n’étaient pas appropriées à la réalité des personnes sourdes. Ce faisant, nous avons pu améliorer la formule et offrir la meilleure expérience aux participantes.

L’adaptabilité et l’agilité — Nous croyons que la clé pour nous adapter facilement en cours de route demeure la préparation. Nous sommes arrivés avec un plan d’animation détaillé… que nous n’avons pas hésité à modifier sur le terrain en observant l’énergie dans la salle. La préparation nous a permis de le faire sans perdre la fluidité de l’animation de la journée.

Un processus participatif — Nous créons des espaces qui permettent aux participantes de prendre du recul à l’égard du quotidien et de réfléchir ensemble. Avec la Maison des femmes sourdes de Montréal, nous avons ouvert cet espace accueillant et inclusif afin que les participantes se l’approprient pour mener les discussions qui comptent vraiment.